ARTICLE : Marine Hunter
PHOTOGRAPHES : Fotoride, Nicolas Peltier, Thomas Seguin, Fred Bonet, Olivier Lhopez
Voici une version plus synthétique de mon article « Le front pour les lâches » publié sur mon blog windsurfeuseinparis.com.
La façon dont j’ai appris le front est complètement à contre-courant des conseils classiques du style: « il faut toiler », « yaka border » et « c’est plus facile que le jibe ». J’avais dix fois trop d’appréhension pour foncer tête baissée dans ce move contre-nature où on provoque la catapulte contre laquelle on a appris à résister toute sa vie.
Je ne prétends pas que c’est une panacée, j’y ai vraiment été progressivement en affinant la technique au fur et à mesure que je prenais confiance.
J’ai pris certains défauts à cause de cette façon de faire et j’ai du corriger au fur et à mesure grâce à des coachings et à pas mal de conseils. Il y a certainement une façon d’apprendre mieux plus vite, mais pour moi un apprentissage pas à pas a été indispensable pour vaincre la peur d’y aller et arriver à tout coordonner.
Apprendre le front m’a pris autant de temps voire plus que le jibe! Si on peut s’entraîner en enchaînant 100 jibes en une session, faire plus de 10 tentatives de forwards dans la même session peut même devenir contre-productif à cause de la fatigue (ça demande plus de dynamisme qu’un jibe) et des douleurs qui deviennent dissuasives à la longue. Quand on commence à faire toujours la même erreur sans arriver à se corriger c’est qu’il temps de passer à autre chose!
COMMENT S’EQUIPER :
Je portais un casque au tout début que j’ai vite abandonné en me disant que sans rien, j’étais obligée de ne pas me rater… C’est mon petit côté barbare ^^ après coup, je regrette surtout l’impact vest, la douleur de certains plats était limite dissuasive!
casque (préférence perso pour le casque de surf Olaian qu’on ne sent pas sur la tête)
impact vest pour réduire la brûlure des plats sur le dos
combinaison 3mm mini, oubliez les shortys! Les plats sur les cuisses ça déchire pas mal aussi…
Evitez les bouchons d’oreilles, sur vous tombez sur le côté c’est hyper désagréable : ils s’enfoncent bien fort pour sauter après, un bonheur.
Dans l’idéal, si vous pouvez trouver un de vos amis qui souhaite passer le front pour vous accompagner et naviguer ensemble, c’est beaucoup plus motivant de se challenger à plusieurs. L’émulation est un gros facteur de progression.
DECOUVRIR LES SENSATIONS DU FORWARD :
NON PLANING
Catapultes avec la voile pour s’habituer à la traction, prendre les bonnes habitudes et voir l’effet des actions des bras
Matos : grosse planche, surface de voile suffisante pour avoir de l’appui (=> plus on toile, plus c’est impressionnant au début). Mieux vaut augmenter la toile progressivement.
Allure : travers
Technique :
je recule la main arrière,
je regarde derrière mon épaule ou je regarde ma main
je borde sèchement
je garde le bras avant tendu
je me laisse emporter en restant tout le temps bordé
Bordé = CONTRÔLE
Bras avant tendu = ROTATION A PLAT SANS DANGER; le bras avant donne l’angle de la rotation: plié = verticalité, tendu = horizontalité. Un front avec le bras tendu tout le long de la rotation tourne mieux, avec moins de hauteur et sera moins moins dangereux.
Résultat à obtenir : je suis passé de l’autre côté de la planche et j’atterris en position waterstart sous le vent de le planche.
PLANING
Cette vidéo qui décompose le forward en plusieurs étapes m’a beaucoup aidé, notamment le wymaroo faisait bien sentir l’influence des jambes sur le pilotage de la planche et les conséquences sur la rotation. Je le faisais très mal mais ça m’a fait ressentir le mouvement différemment.
C’est vraiment le cœur de l’apprentissage: arriver à ressentir et à transcrire en mouvements ce qu’on a lu comme explications et qu’on n’a jamais expérimenté auparavant… Finalement, chaque nouveau move c’est apprendre à marcher ou à faire du vélo pour la première fois!
Je préfère commencer les fronts le plus vite possible dans la session, plus je retarde et plus j’angoisse à l’idée d’essayer alors que ce n’est pas une manœuvre risquée si on assure ces quelques points: sauter au largue, regarder derrière et rester bordé tout le temps. Surtout que je ne sautais pas haut du tout…
Prenez le temps! Inutile d’enchaîner les bords à fond la caisse, il vaut mieux faire un bord où on est concentré, où on a pris le temps d’attendre la rafale pour partir et sauter au bord de la plage et faire une pause de quelques minutes au retour. Gardez de l’énergie pour être efficace. Parfois je partais sur des bords de 2km au large en cherchant la bonne rampe, je pense qu’à certains moments il est plus simple de faire demi-tour et d’attendre une meilleure opportunité au bord. Mais parfois ça paie aussi!
Matos : tout juste au planing, idéalement petite voile et grosse planche pour diminuer l’appréhension de la traction vers l’avant de la voile.
Spot : vent side à side on pour arriver au largue sur les rampes
Allure : largue; c’est plus facile de border qu’au près et la planche est mieux orientée, il y a moins de chemin à faire pour tourner. Comme pour le jibe!
Vagues : petites rampes, voirs mousses molles au début: la mousse projette un peu en arrière, et il y a moins besoin d’être dynamique à l’impulsion, ça saute plus facilement « tout seul » et ça donne un point de repère: quand on sait où on vas sauter exactement, on a le temps d’anticiper et de se préparer. C’est important d’avoir ce temps d’anticipation car le geste de reculer la main arrière n’est pas forcément encore un réflexe acquis.
Technique : Idem:
je repère ma rampe
je suis au largue voile bordée
je ramène la planche sous les fesses en ramenant les jambes pour que la planche sorte de l’eau
je borde le plus possible
Coordonner l’impulsion du saut puis la rotation, c’est le gros défi. souvent je me prenais quelques envols car j’essayais de tourner sans sauter: border avec la planche collée, ça finit en beau lancé d’étoile de mer ^^ Pensez en 2 temps; je saute, je borde.
Au début, ça ne ressemblera pas forcément à grand-chose, le but est de se familiariser avec le fait de se faire emporter vers l’avant et de se rendre compte que même si on a l’impression de monter à 1m50 de haut, il y a encore une énorme marge avant la surrotation… Si on reste bordé et qu’on a pris la rampe au largue, on se rend assez vite compte qu’à part un plat sur le dos, il n’y a aucun danger!!
CITIUS, ALTUS, FORTIUS : SE PERFECTIONNER
J’ai essayé de me faire filmer ou prendre en photo dès que je le pouvais pour les fronts, autrement j’avais l’impression de perdre mon temps car je en savais pas quoi corriger. Je suis une quiche en auto-analyse et le plus efficace pour voir ses défauts reste la vidéo prise de l’extérieur. Les prises Gopro ne me parlent pas spécialement non plus…
Pour la suite, il faut commencer à se lancer sur des vraies vagues assez ouvertes < 1m avec un peu plus de vitesse. C’est indispensable pour s’engager plus sur l’avant. Le problème de sauter sur les mousses, c’est qu’elles vous jettent en arrière ce qui d’une part ralentit la rotation, et d’autre part donne la mauvaise habitude de se mettre trop sur l’arrière.
Vous allez voir vous-même qu’en prenant confiance, vous chercherez à accélérer de plus en plus dans la barre, voire commencer à vociférer des insultes lorsque vous perdrez le planing devant une jolie rampe qui vous faisait des clins d’oeil depuis 20 mètres.
Pour monter un peu plus haut, la trajectoire idéale est de se lancer au largue pour avoir de la vitesse, lofer sur la vague en se redressant pour prendre plus d’amplitude et de faire abattre la planche en l’air dès la sortie de vague. Facile, non? :p
Pendant longtemps certaines photos de mes fronts ressemblaient à des descentes de backloop au milieu de la rotation, malgré le fait de sauter au largue il y avait une phase de saut assez verticale avec le mât qui touchait parfois l’eau. En fait, mon problème était que je repliais les bras une fois en l’air en ayant peur de trop tourner. Fatal error!
Si vous avez ce problème, voici quelques pistes (merci la clinic de Josep Pons):
==> faire abattre la planche dès la sortie de la vague, et l’agripper avec les pieds de façon à la faire gîter et présenter la carène au vent: la prise au vent aide à tourner
==> tendre la jambe avant
==> garder le bras avant tout le temps tendu et la main arrière tout le temps bordée
Résultat : on réceptionne on largue, même avec peu de hauteur le mât ne touche pas l’eau, la rotation se fait plus sur le côté et est plus efficace.
GERER LA VITESSE ET LE VENT FORT
Ces deux points-là sont ma bête noire!! Dans le vent fort j’ai compris que ça en servait à rien d’être à fond la caisse au largue pour un front classique, c’est assez dur à tourner et à contrôler. Mieux arriver un peu plus piano et lofer sur la vague. Tous les défauts sont amplifiés dans ces conditions, il ne faut vraiment pas avoir peur de TOUJOURS garder le bras avant tendu et la main arrière bordée JUSQU’AU BOUT. C’est la garantie d’un beau front.
Pour la vitesse, la seule manière de la gérer et de monter plus haut et de temporiser, avec la gravité on ralentit automatiquement… Mais ça demande d’avoir confiance en soi. Souvent, je remarque qu’en vidéo je suis toujours moins haut que ce que je ne pense l’être en réalité!
Concernant la partie perfectionnement, beaucoup de vidéos en parlent mieux que moi :
etc…
Coachs au poil :
Benoit Gendre en Charente-Maritime
Nico Akgazciyan (clinic Fun&Fly)
Josep Pons (Gran Canaria)
Il y en a sûrement d’autres qui ont une très bonne pédagogie, le tout est de trouver la méthode qui vous correspond. Bons loops!!